Didier Decoin Autopsie d’une étoile

Édition du seuil Coll. « Points Roman »

Récit de Burton Kobryn p. 171

J’envisageais sa vie près de moi comme celle d’un animal que l’on aime, tout en se rappelant que le temps qui passe n’a pas la même valeur pour lui que pour nous.

La séparation est inscrite dans son sang, dans ses organes, et c’est au moment où l’animal at­teint sa plus grande splendeur qu’on sent approcher l’heure de cette séparation. On voudrait gar­der l’animal beau, vif, libre et joueur, et surtout, désespérément, le garder nôtre.

Alors, on lui permet de coucher sur des lits jusque-là interdits, on lui donne à déchiqueter le fouet dont on le menacait, le soir on lui propose une friandise sans ignorer que ce sucre-là le tuera peut-être un peu plus tôt encore. C’est comme un marché qu’on tente de conclure avec lui, on veut lui faire comprendre qu’on est capable d’aller tellement plus loin dans le don, dans l’amour, s’il consent à rester, c’est-à-dire à ne pas mourir.

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